2.02 - Jour de courses
Lady Whistledown : Très chers lecteurs.
La compétition, à ce qu'il paraît, est une opportunité pour chacun de se lever et de se tenir prêt à affronter ses plus grands défis. Certes, si ce que votre chroniqueuse a entendu dire ce matin est vrai, un grand défi concernant le diamant de la saison vient d'être lancé.
Chaque prétendant désireux d'obtenir une audience auprès de miss Edwina Sharma doit d'abord apprivoiser la mégère, cette vieille fille épineuse qui lui tient lieu de sœur.
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Lady Danbury : Lord Lumley en haut de la liste.
Edwina : N'est-il pas une sorte de dandy ?
Kate : J’emploierai plutôt le terme "galant".
Mary : Quelqu'un comme lui vous plairait Edwina ?
Edwina : Si Kate pense qu'il me convient, moi aussi.
Benedict : Miss Sharma.
Anthony : Miss Edwina Sharma. Pas la sœur. Miss Edwina suffira.
Lady Danbury : Je vois que vous avez omis lord Bridgerton.
Mary : Oui, lui correspond aux attentes d'Edwina.
Lady Danbury : Un oubli de votre part, ma chère ?
Kate : Lord Bridgerton s'y entend bien pour donner de lui bonne impression.
Lady Danbury : Que savez-vous de lui ?
Kate : Il a dit tout à fait clairement rechercher une femme uniquement par devoir et en fait, il ne croit pas à l'amour du tout.
Anthony : C'est uniquement par affection pour ma famille que je me cherche une fiancée avec ma tête et pas avec mon… cœur.
Lady Danbury : Et cela vous paraît extraordinaire ? La plupart des mariages de la bonne société sont en fait de simples mariages d'affaires, ma chère. Des affaires qui ont cours et fonctionnent depuis des siècles. C'est le véritable amour qui est une chose très rare.
Benedict : Miss Edwina partage ton affection ?
Anthony : Pas encore. Elle m'aimerait déjà s'il n'y avait…
Benedict : La grande sœur. Elle est épineuse, j'imagine ?
Anthony : En effet.
Kate : Tu sais quelles sont tes attentes, Bonne. Tu ne dois pas les oublier. Avec lord Lumley, le vicomte ne sera plus qu'un lointain souvenir. J'en suis certaine.
Anthony : Mais elle ne me trouble pas. Quand on y songe, toutes les roses ont des épines après tout.
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… Naturellement, la seule compétition qui attire mon attention est le jeu de la séduction. Alors bonne chance aux joueurs de cette année. Surtout évitez de trébucher sur la ligne de départ. …
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Les prétendants se pressent chez Lady Danbury.
Un prétendant : Miss Sharma, devrais-je patienter sur le seuil de la porte toute la journée ?
Second prétendant : Lumley a déjà passé un temps excessif avec elle.
Kate : C'est parce que ma sœur est tout à fait captivée par sa conversation. Et vous n'aimeriez pas que je vous interrompe quand ce sera votre tour, ai-je tort ?
Anthony : Écoutons cette jeune dame, et attendons avec la grâce accordée par notre hôtesse.
Kate : Merci, lord…
Anthony : Bridgerton.
Kate : Je crains fort que vous ne soyez en retard monsieur. Vous vous trouvez le dernier d'une queue considérablement longue.
Anthony : Je souhaite escorter miss Edwina aux courses cet après-midi.
Kate : Ma sœur a déjà un cavalier cet après-midi.
Anthony : Demain alors ?
Kate : Elle est aussi engagée demain.
Anthony : Et le jour suivant ?
Kate : Maintenant que j'y songe, elle devrait être libre. Après Noël. Sauf bien sûr si elle est en pleine lune de miel. J’ai dit quelque chose de drôle ?
Anthony : Vous m'avez fait rire.
Kate : C’est vrai ? Ce qui est drôle monsieur, c'est vous ici maintenant, après ce que j'ai entendu l'autre soir.
Anthony : Ce que vous avez entendu n'était pas pour vos oreilles.
Kate : Mais cela vient également s’ajouter à ce que j'ai lu sur vous. Votre réputation de libertin vous précède.
Les prétendants :
- Pas de passe-droit, Bridgerton ! Au bout de la queue !
- Oui, il a raison !
- Oui !
Pénélope : Est-ce un exemplaire du lady Whistledown ?
Eloïse : Oui, en effet.
Pénélope : Je croyais qu'on en avait assez d'elle.
Violet : Ne la découragez pas. Si elle s'est prise d’intérêt pour lady Whistledown, c'est peut-être qu'elle s'intéresse à ce qu'elle peut lire sur les gentlemen célibataires de la saison.
Eloïse : Je n'arrive pas à trouver une façon plus intelligente de le dire : mais non ! Son dernier feuillet n'est pas le traité de philosophie sur les droits du beau sexe que j'avais espéré, mais…
Pénélope : Je doute que Lady Whistledown n’ait changé entièrement son style d'écriture si soudainement.
Eloïse : Peut-être pas. Mais peut-être le fera-t-elle ?
Pénélope : Peut-être ne le veut-elle pas. Peut-être est-elle satisfaite. Et puisqu’elle a éveillé à nouveau votre intérêt, peut-être que ses écrits plaisent aux lecteurs ?
Eloïse : Oui, mais elle pourrait faire tellement plus. Je sais que je pourrais l'en convaincre, si toutefois j'arrivais à la trouver, cette fois.
Violet : Ce que vous devez trouver, ma chérie, c'est le bonheur. Pénélope, aidez-moi. Éloïse pourrait trouver le bonheur avec quelqu'un, n’est-ce pas ?
Pénélope : J'imagine que oui. Et pas avec lady Whistledown mais avec quelqu’un que … Colin ?
Eloïse : Mon frère ?
Pénélope : Non pas que … Colin !
Colin : Content de voir que les choses n’ont pas changé.
Eloïse : Mon frère !
Violet : Colin !
Colin : Pourriez-vous mettre de côté la dernière dispute familiale et m’embrasser ?
Violet : Je ne m’attendais pas à ce que vous rentriez aussi tôt, mon chéri.
Colin : J’avoue que vous me manquiez trop.
Hyacinthe : Mon frère, mon frère !
Benedict : Il nous faudra t’emmener sur l’heure chez le médecin. Cet étrange duvet qui t’a poussé au menton est sans nul doute une maladie.
Colin : Très drôle
Francesca : Et tu sembles aussi avoir pris le soleil. Que c’est bizarre.
Pénélope : Je lui trouve l’air distingué.
Hyacinthe : Maintenant je dépasse Grégory de 2 centimètres.
Gregory : Pas du tout, regarde !
Colin : Et où se trouve donc notre intrépide vicomte ?
Violet : Il est ... déjà rentré de faire sa cour à une jeune fille.
Anthony : Colin ! tu es rentré, c’est encore mieux. Chère famille, je vous demande de vous préparer pour aller aux courses aujourd’hui. Nous allons nous y rendre, unis comme un seul homme.
Le nouveau lord Featherington a fait installer un râtelier pour ses armes et ses trophées.
Madame Varley : Je lui ai dit que vous n’aimeriez pas madame, mais il a insisté.
Pénélope : C’est l’œuvre de cousin Jack ?
Portia : Cousin ? C’est ainsi qu’il vous demande de l’appeler ?
Pénélope : Sa présence vous ennuie maman ?
Portia : Ho bien sûr que non. Le nouveau lord Featherington est venu pour nous couvrir de bienfaits et de richesse. S’il nous faut endurer quelques choix de style douteux en échange, en plus de points discutables en matière de savoir vivre, alors, on doit l’accepter.
Madame Varley : J’ai aussi cru comprendre qu’il voulait transformer la petite salle à manger en salle de jeux privée.
Le nouveau lord Featherington arrive.
Jack : Aaah, le résultat est splendide. Ça donne un peu de vie à l'endroit.
Portia : Un ornement heureux, monsieur. Encore plus approprié dans votre chambre peut être.
Pénélope : Ce sont tous vos trophées, cousin Jack ?
Jack : Chaque arme accrochée ici a une splendide histoire et est digne d'intérêt, Pénélope. Il faudra que je vous raconte toutes mes aventures un jour. Bien ! Mesdames, habillez-vous vite, nous assistons aux courses royales aujourd'hui.
Il y a foule pour les courses royales à Ascot.
Philippa : Ce sera une petite cérémonie intime, car M. Finch dit vouloir que rien ne le distraie de la mariée. C'est incroyable, non ?
Prudence : Tout à fait incroyable. Tu ne trouves pas, Pénélope ?
Pénélope : As-tu vu les Bridgerton ?
Lord Lumley : Quel bonheur que vous aimiez la littérature comme moi. Appréciez-vous Byron ?
Edwina : J'ai beaucoup lu, mais je me considère novice en poésie.
Kate : Quelle bonne fortune de trouver un connaisseur en poésie comme Lumley.
Lumley : Beaucoup considèrent la poésie comme des platitudes, des mots à lire à mi-voix. Pour moi, au contraire, on doit la lire à haute voix comme une musique. Tenez, j'ai toujours un petit recueil de poche de mes poèmes préférés partout où je vais.
Dorset : Lady Danbury, je vous serai reconnaissant de me présenter convenablement. J’ai bien peur que ma carte se soit égarée dans tout ce battage chez vous ce matin.
Lady Danbury : Bien entendu. M. Thomas Dorset, permettez-moi de vous présenter miss Sharma et miss Edwina Sharma.
Dorset : C’est un plaisir.
Kate : Je crains que ma sœur ait déjà un cavalier pour aujourd'hui, M. Dorset.
Dorset : C'est ce que je vois. Cela dit, j'avais espéré bavarder avec vous.
Dorset : Que vous inspire la saison, miss Sharma ?
Kate : C'est une saison, M. Dorset. Je devrais sans doute…
Dorset : Londres est affreusement loin de Bombay. Vous arrivez bien de là-bas, non ?
Kate : Oui.
Dorset : Je connais l'Inde. C'est un pays magique. Il doit beaucoup vous manquer.
Kate : Chaque jour à chaque instant. Mais particulièrement à l'heure du thé. … Il faut trouver nos sièges.
Dorset : Je vous accompagne ?
Will Mondrich : Les Bridgerton !
Benedict : Monsieur Mondrich. La retraite vous réussit, apparemment.
Alice Mondrich : Si seulement il était retraité.
Colin : Avez-vous l’intention de faire une incursion sur le ring ?
Mondrich : Dans les affaires, plutôt. Je vais ouvrir un club pour gentlemen, destiné à rivaliser avec les cercles situés sur Saint James, si nous avons de la chance.
Anthony : Vous savez que nous sommes membres du White de père en fils ?
Mondrich : L'inauguration aura lieu demain. Vous êtes tous invités bien sûr.
Anthony : Excusez-moi, vous voudrez bien me pardonner ?
Benedict : Dites-moi, Monsieur Mondrich. J'aurais bien besoin de stimulation.
Violet : Regardez donc votre frère. La saison mondaine le frustrait au début lui aussi, mais regardez-le. Il semble que cette miss Edwina lui ait donné le goût de faire sa cour à présent. Ce que je veux vous dire, Éloïse, c'est que nous devons nous efforcer de trouver le partenaire qui éveille notre curiosité.
Eloïse : Alors, je danserai avec une flopée de grenouilles et l'une d’elles se transformera en prince.
Violet : Pourquoi pas, si c'est le prix à payer. Votre père, vous savez… Éloïse, est-ce que vous m'écoutez ? Qu'avez-vous dans la main ?
Eloïse : Mais rien, maman. Ce n’est qu’une brochure sur… une nouvelle méthode de toilettage de chiens, apparemment. Hé bien quoi ? Une lady a le droit d'avoir un passe-temps, non ? Merci.
Kate : M. Dorset, vous voyagez loin et assez souvent, apparemment ?
Dorset : Oui, pour mes études. Je trouve la médecine particulièrement fascinante.
Edwina : Aider les autres est une noble cause, c'est certain. M. Dorset te ressemble à cet égard, ma sœur.
Kate : Edwina, as-tu questionné lord Lumley sur ses intérêts ou pas encore ?
Lord Lumley : Lord Bridgerton !
Anthony : Miss Sharma. Miss Edwina. Lumley.
Edwina : Je suis enchantée de vous voir, monsieur.
Dorset : Lord Bridgerton, permettez-moi de me présenter. M. Thomas Dorset.
Anthony : Miss Edwina, j'avais espéré vous rendre visite ce matin…
Kate : Ma sœur est parfaitement au courant…
Anthony : J'avais promis à ma famille de les rejoindre au petit déjeuner. Nous sommes incroyablement proches. Nous nous retrouvons régulièrement. Oh ! Regardez. Ils sont tous là.
Edwina : On peut souvent juger un homme d'après sa famille. Elle en dit long sur lui.
Kate : Oui, il y a beaucoup d’excellentes familles très aimantes dans cette société, non ?
Lumley : Aucune n’est aussi accueillante que les Bridgerton. Ma mère est désireuse de revenir prendre le thé à Bridgerton House depuis un moment déjà.
Anthony : Nous devons réaliser son vœu, mon ami. À propos de boissons, je viens de remarquer que ces dames n'en avait guère.
Kate : Nous sommes très bien ainsi monsieur.
Anthony : Il fait une chaleur du diable pour la saison et tout gentleman qui se respecte…
Lumley : Miss Edwina, permettez-moi d'aller vous chercher une limonade.
Edwina : Ho ! Ce sera des plus agréable. Merci, monsieur.
Lumley se lève et se dirige vers le stand des boissons. Anthony en profite et s’installe à sa place, entre Edwina et Kate.
Anthony : Excusez-moi. C’est une splendide journée pour une course.
Colin : Pen !
Pénélope : Colin !
Colin : Nous n'avons pas eu l’occasion de parler ce matin.
Pénélope : Mais si, j'ai dit : "Colin !" Mais, enfin, ce n'était rien de notable. J'avais envie d'en entendre plus sur vos voyages.
Colin : J'aurais cru que mes voyages finiraient par vous lasser. Vous avez lu et répondu à mes lettres plus que n’importe qui d’autre.
Pénélope : C'est possible… Bien qu'il y ait toujours plus à dire qu'on ne peut en mettre sur une page.
Colin : Pen. Est-ce que vous allez bien ?
Pénélope : Oui, plutôt bien. Et vous ? Ne répondez pas. Je sais ce que vous ressentiez en explorant les pentes du mont Olympe, la fauconnerie avec les Turcs.
Colin : Tout ça était passionnant.
Pénélope : Et aussi solitaire, il me semble.
Colin : Oh. Mais je n'étais jamais seul, en fait.
Pénélope : Je vois. Vous avez rencontré quelqu'un …
Eloïse : Pénélope, Pénélope, je vous retrouve enfin.
Pénélope : Vous me trouvez toujours.
Eloïse : Tu es là depuis à peine quelques heures et déjà sur mon chemin ?
Colin : Tu m'as aussi beaucoup manqué, Éloïse.
Eloïse : Je crois avoir fait une découverte. Whistledown a un nouvel imprimeur.
Pénélope : Ho, impossible.
Eloïse : Pour de simples mortels, oui. Mais je commence à sentir mon vrai pouvoir. Vous avez remarqué en quoi est faite la brochure ?
Pénélope : C'est du papier ?
Eloïse : Précisément ! Le papier a la même texture que celle du Whistledown.
Pénélope : Tous les papiers ne sont-ils pas pareils.
Eloïse : La texture, le poids, le grain, la façon dont la lumière passe au travers quand on le tient en l’air. Oui, je vois que vous pensez que je suis folle.
Pénélope : Je n’ai pas dit ça.
Eloïse : Si, je le sais.
Pénélope : Vous êtes surtout passionnée, mais je crains que ce ne soit qu’une coïncidence.
Eloïse : Cette brochure est sans doute ce qu'elle semble être.
Pénélope : Un ramassis d'instructions pour éduquer un chiot et rien d'autre.
Eloïse : Hmm. Oui. C'est ça. Vous devez avoir raison.
Pénélope : Je dois aller faire semblant de me réjouir des noces prochaines de ma sœur.
Eloïse : Transmettez-lui mes amitiés.
Eloïse relit la brochure, et l’adresse de l’imprimeur :
IMPRIMEURS CHANCERY LANE
LONDRES 1814
Anthony et Edwina discutent en chuchotant, ce qui exaspère Kate.
Anthony : … … C’est un champion …
Edwina : … … Vraiment ?
Kate : Lord Lumley semble s'être égaré lors de son voyage au stand de limonade.
Dorset : Je peux très bien aller le chercher ?
Kate : C’est le vicomte qui a insisté pour les rafraîchissements. Il pourrait peut être y aller ?
Anthony : Avec la course qui va commencer !
Edwina : Quel est votre favori ?
Kate : Edwina !
Anthony : Nectar. De bonne race, un excellent entraîneur. Et d'un bon naturel.
Kate : Nectar, vraiment ?
Anthony : Oui. Mon instinct dit qu'il va gagner.
Kate : Votre instinct ?
Anthony : Je vous demande pardon ?
Kate : Vous avez simplement choisi le grand favori. Vous parlez d'un instinct.
Anthony : J’ai parié stratégiquement.
Kate : Vous avez jugé le cheval selon son tempérament et selon les conditions de la piste pour pouvoir évaluer son vrai potentiel ?
Edwina : Tu ne trouves pas qu’il fait beaucoup plus chaud que tout à l’heure ?
Anthony : C’est un pur-sang primé.
Dorset : Nous pourrions peut être trouver des places ombragées.
Kate : Nectar a bien couru à Doncaster, mais le terrain était plus ferme, le temps était plus frais. Ainsi sa taille était un avantage. Aujourd'hui, la piste est souple et il fait chaud. Il va devoir s'employer pour avancer, il arrivera surchauffé et ralenti dans le dernier tour et il concèdera la victoire à High Flyer, une jument plus vive et plus légère.
Anthony : Vous analysez bien trop de choses.
Kate : Et vous, pas assez.
Violet : Votre invitée a attiré l'attention du vicomte, lady Danbury.
Lady Danbury : Il semble en effet que ce soit le cas. Vous comprenez bien que puisque j'ai miss Edwina comme protégée, je dois rester neutre tant qu'elle n'a pas fait son choix.
Violet : Bien sûr.
Lady Danbury : Mais en tant qu'amie, je vous dirai qu'il peut y avoir un obstacle sur la route de votre fils. La sœur aînée est arc-boutée contre ce mariage. Il semble que miss Edwina désire un mariage d'amour et le vicomte n'en veut clairement pas.
Violet : Je vois.
Lady Danbury : Peut-être que miss Edwina changera d'avis.
Violet : Peut-être que le vicomte aussi.
Lady Danbury : Hmm.
Lord Lumley revient avec deux verres de limonade et en tend un à Edwina. Avec aplomb, Anthony tend la main et prend le deuxième.
Lord Lumley : Toutes mes excuses pour cette attente.
Dorset : Aucune importance. Lord Bridgerton s'est employé à nous divertir.
Lord Lumley : Je n’ai pas de doute là-dessus.
Kate : Il y a une place pour vous, monsieur.
La course est partie, tout le monde est debout et crie des encouragements. Kate siffle même, comme un garçon.
Anthony : Allez, vas-y, Nectar !
Kate : Allez, High Flyer !
Anthony : Allez !
Kate : Régulier, attaque ! Plus vite, High Flyer !
Anthony : Avance !
Dorset : Il faut peut-être les séparer ?
Edwina : C'est de bonne guerre. Je crois.
Lord Lumley : Hooo ! Je m'amuse comme un fou.
Kate : Oui !
Anthony : Plus vite !
Prudence : On a gagné !
Portia : Prudence ! Ne hurlez pas comme une poissonnière.
Jack : Laissez-la s'amuser. On a tous gagné aujourd'hui.
Kate : Je dois l'avouer, c'est la première fois que je gagne contre un vicomte. Vous battre est réjouissant, comme toutes les victoires, mais celle-ci a une saveur particulière.
Edwina : Kate, Nectar ne te rappelle pas ce beau cheval que j'adorais tant ? Tu vois lequel ?
Anthony : Prenez mon bras. Nous irons le voir.
Lord Lumley : Excellente idée.
Dorset : Miss Sharma, j'aimerais savoir. Pourquoi étrillez-vous lord Bridgerton ?
Kate : Si le vicomte a des intentions sérieuses envers ma sœur, je crois de mon devoir de le mettre à l'épreuve.
Dorset : Le vicomte a horreur de perdre. Il ne le supportait pas déjà à l'époque d'Oxford. Oh… Miss Sharma, je…
Kate : Le vicomte et vous, vous vous connaissez depuis Oxford ? Pas depuis tout à l’heure ?
Dorset : J'en ai trop dit, pardon.
Kate : Oh vous allez m'en dire plus, et immédiatement.
Dorset : Il pensait que vous m'auriez mal jugé si vous nous saviez amis, mais je vous assure que mon intérêt à votre égard était authentique et pour ma part, je …
Kate : Authentique au sens où on vous a envoyé détourner mon attention pour que lord Bridgerton se rapproche de ma sœur.
Edwina : Kate, c'est affreux. Ils disent que Nectar va être envoyé à l'équarrissage.
Kate : Nous partons.
Anthony : J'ai vu des mauvais perdants, miss Sharma, mais de mauvais gagnants, jamais.
Kate : N'adressez plus jamais la parole à ma sœur ni à moi à l’avenir.
Edwina : Que s'est-il passé ?
Kate : Il semble qu’il se jouait un jeu en parallèle aujourd'hui et lord Bridgerton a fait en sorte de m'assigner le mauvais rôle. Allons-y.
Anthony : Je ne pensais pas à mal. Je voulais seulement passer du temps avec vous.
Eloïse s’est faite conduire chez l’imprimeur.
Valet de pied : Miss Bridgerton, peut-être n'est-ce pas une décision très sage.
Eloïse : Il n’empêche que vous avez pris la moitié de ma bourse pour m'escorter.
Valet de pied : Je vais vous rendre l’argent. Cette partie de la ville n'est pas sûre pour une jeune dame comme vous.
Eloïse : Tenez, l'autre moitié. Surveillez la rue. Trop tard pour reculer.
Eloïse trouve la porte fermée, elle tape sans réponse, puis elle entend du bruit à l’arrière de la boutique. Il y a un jeune homme qui l’apostrophe.
Jeune homme : Vous cherchez qui ?
Eloïse : Dites-moi ce que vous savez d'elle.
Jeune homme : De qui ?
Eloïse : On sait que Lady Whistledown fait imprimer ici ses brochures.
Valet de pied : On le sait ?
Eloïse : Sinon, pourquoi serait-on venu ici ?
Jeune homme : Je pense que vous êtes perdue.
Eloïse : Et je pense que vous évitez ma question.
Jeune homme : Vous n'avez posé aucune question.
Eloïse : Euh… il y a quoi, dans ces brochures ?
Jeune homme : Rien pour les gens comme vous. Pour vos potins frivoles, vous n’êtes pas à la mauvaise adresse.
Eloïse : Il ne s’agit pas de … Je ne suis pas à la recherche de quelconques potins.
Jeune homme : Ha non ? Ni de renseignements sur le célibataire le plus acceptable du marché ?
Eloïse : Vos hypothèses n’ont rien de surprenant. Après tout, les femmes n'ont le droit qu'à deux sujets d'intérêt. Le mariage ou bien les commérages. Il ne vous viendrait pas dans l’idée que j’espérais trouver l'auteur des articles pour parler de sujets plus intellectuels comme, par exemple… les droits des femmes. L'exploration de leur esprit, un esprit que je discerne comme étant bien supérieur au vôtre. Et l'air hébété que vous affichez à présent est dû au fait que je sais m'exprimer et que je suis instruite ? Ou bien souffrez-vous d’une maladie dont vous devriez m’informer.
Il lui donne une brochure.
Eloïse : Ce n’est pas ce …
Jeune homme : Si les droits des femmes vous préoccupent, c’est plutôt ça que vous devriez lire. Une nouvelle vision. Des idées déconcertantes. Pas trop pour vous, j'espère ? Cela dit, si jamais je croise lady Machin chouette, je ne manquerai pas de la saluer de la part d'une fidèle lectrice.
Le mariage de Philippa et d’Albion Finch.
Prêtre : Je vous déclare mari et femme.
Mrs. Finch : C'est magnifique ! Et de songer que nous sommes une grande famille, maintenant, lady Featherington.
Portia : Oui. Quelle pensée réconfortante.
Mr. Finch : Nous devons le dire au nouveau lord Featherington. Où est le nouveau lord Featherington ?
Portia : Il est ici quelque part. Je vais le trouver de ce pas.
Mrs. Finch : Vous vous êtes assuré que la dot était payée ?
Mr. Finch : Bien sûr que je me suis assuré que la dot était payée !
Portia entre dans le bureau où Jack Featherington vérifie les comptes.
Jack : J'aurais volontiers assisté aux noces, madame, mais vous souhaitiez réduire le nombre des invités au minimum.
Portia : Quel intérêt aurait un mariage sophistiqué, monsieur, quand il y a des affaires autrement plus importantes pour lesquelles dépenser son argent ?
Jack : Si vous le dites.
Portia : Surtout avec deux autres jeunes filles à marier et donc deux dots de plus à verser.
Jack : Ma parole, c'est un véritable casse-tête. Il a fallu moins de compétences pour creuser mes mines en Amérique que pour comprendre les livres de comptes de feu mon cousin.
Portia : Pour un homme de votre fortune, régler la succession devrait se faire sans difficultés.
Jack : Cela aura une influence sur mes projets immédiats.
Portia : Quels projets ? Cela pourrait vous être utile de m'impliquer dans vos projets, monsieur. Peut-être que nous pourrions agir de concert en quelque sorte. Vous êtes nouveau ici, après tout. Il faudrait une personne pour vous tenir informé de certaines affaires.
Jack : Oui, là-dessus, je vous rejoins, madame.
Portia : Excellent, dans ce cas…
Jack : C'est bien pourquoi je prévois de trouver cette personne au plus vite.
Madame Varley : Vos nouvelles connaissances demandent à vous voir, monsieur.
Jack : Hé bien après tout, ça peut attendre. Allons faire honneur à Philippa.
Jack : J'apprécie beaucoup les mariages. Et vous, Mme Varley ?
Madame Varley : Oui, certainement, monsieur. Il a vraiment un sourire charmant.
Portia : Ce sourire charmant sera la dernière chose que l'on verra après qu’il aura installé une petite effrontée dans notre chambre et qu'il m'aura chassée de ma propre maison. On verra alors s'il vous plaît toujours autant.
Lady Danbury, Kate et Edwina attendent la reine.
Edwina : Pour être honnête, tu ne lui as pas laissé de choix. Tu l'as empêché de me présenter ses hommages.
Kate : Son stratagème t'a plu ?
Edwina : Non. Mais toi-même, tu disais que Appa pensait qu'il faut du courage à un homme pour tenter d’obtenir ce qu'il veut.
Kate : Appa disait aussi que la marque d'un vrai gentleman est l'honnêteté. Et manifestement le vicomte en est dépourvu.
Lady Danbury : Votre Majesté.
Charlotte : Lady Danbury. Miss Sharma. Et mon diamant. Venez. Il y a beaucoup de choses à voir.
Charlotte : On appelle ces créatures des "zèbres". Ce sont des chevaux rayés qui viennent d'Afrique, en fait. J'en attends sept de plus la semaine prochaine. L’ennui, c’est que je ne trouve pas de noms pour chacun d'eux. Après 13 enfants, je suis à court d'idées.
Lady Danbury : C'est une ménagerie exceptionnelle, Votre Majesté.
Charlotte : Elle l'est en effet. Miss Edwina.
Edwina : Oui, Votre Majesté.
Charlotte : Vous avez dû apprécier l'attention que vous avez certainement suscité en tant que diamant de la saison.
Edwina : J'en suis fort consciente, madame. C'est un incommensurable honneur.
Charlotte : Ce n'est pas un manteau facile à endosser, vous vous en rendez compte. Avoir tant de paires d'yeux fixés sur vous en permanence. Au mépris de la vérité, on bavarde. Que dis-je, on commère. On va inventer des mensonges éhontés. Une rumeur est bien souvent une épreuve difficile à endurer. Demandez à votre mère. Demandez-le-moi.
Kate : Ma sœur aspire à imiter votre illustre exemple, Votre Majesté. Votre mariage, le merveilleux amour qui vous unit au roi. Edwina désire ce même bonheur.
Charlotte : Et elle en recevra autant. Si elle sait à qui faire confiance.
Kate : Lady Danbury est notre guide indéfectible pour cette saison. Et je suis là moi aussi pour protéger ma sœur.
Charlotte : Vous m'en direz tant. Une vraie garde rapprochée. Cependant, sachez que beaucoup de fâcheux s’emploieront à le briser à des fins personnelles. Et quand ces personnes finiront inévitablement par se dévoiler, et dévoiler leurs intentions sournoises, je serais d'avis que vous me disiez qui elles sont afin que je puisse décider si elles sont dignes d'intérêt, bien entendu.
Lady Danbury : Miss Sharma, vous devriez emmener votre sœur voir le reste de ces splendides jardins.
Charlotte : Oui. Les casoars se trouvent de l'autre côté du pont. Soyez prudentes, ne vous approchez pas trop. Ils sont de méchante humeur.
Lady Danbury : Quelque chose me dit, madame, qu'un certain nombre d'intentions sournoises sont à l'œuvre ici.
Charlotte : Cela se voyait tellement ?
Lady Danbury : Vous cherchez à démasquer lady Whistledown avec l'aide de votre diamant. La chroniqueuse tentera de l'approcher et quand elle le fera, Votre Majesté l'attendra au tournant. Avez-vous choisi miss Edwina dans ce dessein au départ ? Quelqu’un qui n’était pas là la saison dernière ?
Charlotte : Par conséquent, je pouvais lui faire confiance, oui.
Lady Danbury : Hmm.
Charlotte : Lady Danbury. Ne faites pas votre scandalisée. Vous êtes friande de ce genre de frivolités presque autant que je le suis.
Lady Danbury : Cette saison est différente.
Charlotte : Vous acceptez peut-être de gâcher votre plaisir, ma chère, mais je vous interdis de me gâcher le mien. Laissez-moi vous montrer où je loge mon éléphant.
Anthony, Colin et Benedict s’entrainent à l’escrime.
Anthony : Elle est présomptueuse et arrogante et elle est sûre de savoir gérer le mieux toutes les situations.
Benedict : Elle a l'air terriblement ennuyeuse. D’autant que c'est toi celui gère le mieux toutes les situations.
Colin : Et qui es le vainqueur de tous les duels aujourd'hui.
Anthony : Moins de parlote et plus d'escrime veux-tu ?.
Colin : Bonne chance.
Benedict : Allons-y.
Anthony : Tu sais pourquoi je gagne à chaque fois ?
Benedict : Parce que si tu perds, tu nous accuses d'avoir triché.
Anthony : Parce que je connais mes devoirs, les buts que je poursuis et comment les obtenir. Et j'obtiendrai ce que je veux en faisant de miss Edwina ma vicomtesse. Nous sommes bien assortis. C'est une jeune fille adorable et elle veut des enfants. Elle fera une épouse des plus agréables.
Benedict : Autrement dit, il a déjà disqualifié toutes les autres jeunes filles de la ville.
Colin : Tu te mets trop de pression sur les épaules. Ta vie serait plus facile si tu évitais de courtiser quelqu'un dont la sœur est une mégère.
Anthony : Pourquoi serait-ce à moi d’admettre la défaite ? Quelle que soit la jeune fille que j'aurai choisi de courtiser, il y aura toujours un père obstiné ou une tante fouineuse dans le tableau. je ne laisserai pas une quelconque sœur, et plus jeune que moi qui plus est, m'empêcher d'obtenir ce que je veux.
Benedict : Qui tu veux, tu veux dire ?
Colin : Est-ce toujours un duel amical ou doit-on porter une armure ?
Anthony : C'est ce que tu ne comprends pas, Colin. Benedict me respecte en ne me ménageant pas. Comme moi, je le respecte. Regarde.
Benedict : Yah ! Tu parles de respect.
Anthony : Merci, messieurs, pour l'effort tonifiant. Et maintenant, je vais m'assurer de ma victoire finale de la journée. Croisez les doigts.
Chez Lady Danbury
Edwina : Ça s'appelait des zèbres, d'après la reine.
Lady Mary : C'était donc une visite plaisante ? Je suis navrée de ne pas avoir pu y assister.
Kate : Ho Je suis certaine que ce n'est pas la dernière fois que nous serons invitées au palais. Sa Majesté a semblé vraiment séduite par Edwina, ne trouvez-vous pas, lady Danbury ?
Lady Danbury : J'avais envisagé une soirée, ce soir même, pour que miss Edwina puisse apprendre à mieux connaître ses nombreux soupirants. Je veillerai à tout.
Edwina : J'en serai ravie.
Kate : Il faudra être judicieuse dans le choix des invités. Excusez-moi.
Elle regarde par la fenêtre puis descend dans la cour où Anthony est arrivé avec un cheval.
Anthony : Brave bête.
Kate : N'ai-je pas été assez claire ?
Anthony : J’apporte un cadeau à miss Edwina.
Kate : Emportez votre cheval de Troie ailleurs monsieur.
Anthony : Je vous assure, miss Sharma, celui-ci est un vrai cheval. Il est vivement déconseillé de grimper dedans.
Kate : Au fond, tout ceci n'est qu'un jeu pour vous.
Anthony : Je ne suis pas venu m'amuser.
Kate : Alors, qu'était M. Dorset sinon une farce trompeuse ?
Anthony : Cette affaire avec monsieur Dorset était moins trompeuse que vous ne l'imaginez.
Kate : Vous remettez en question mon jugement ?
Anthony : Vous remettez en question le mien ?
Kate : Je n'ai jamais rencontré un homme aussi présomptueux et sans vergogne.
Anthony : Vous ne me connaissez pas !
Kate : Vous avez de belles manières, vous êtes rigoureux et vous faites des promesses sans avoir même prononcé un mot. Je crois n’avoir pas besoin d'en savoir plus.
Anthony : Tenez.
Palefrenier : Merci, monsieur.
Anthony : Vous me reprochez encore ce que vous avez entendu sur la terrasse ? Vous agissez comme si j'étais un bandit. Alors que toutes les femmes à Londres aspirent au genre de mariage que je peux offrir. Et vous le savez, vous avez été parfaitement claire sur ce que vous souhaitiez et sur ce que vous ne souhaitiez pas. Mais il faudrait vous demander si en fait, ce mariage n'est pas ce que votre sœur désirerait.
Edwina : Lord Bridgerton.
Anthony : Miss Edwina. Je vous apporte un petit cadeau en souvenir de nos bons moments aux courses hier.
Edwina : Oh. Le cheval est pour moi ?
Anthony : J'ai cru que vous aimiez les animaux.
Edwina : Oui. Mais plutôt de ceux que je câline quand ils grimpent sur mes genoux.
Anthony : Ah. Toutes mes excuses. Vous aviez mentionné le fait que Nectar vous rappelait une bête que vous aimiez tant, hier au ...
Kate : Le cheval en question est un personnage de roman. Un roman d'amour, en fait. Et ma sœur est passionnée de ce genre de livres.
Edwina : Je suis touchée, monsieur. Ce cheval est un geste d'une grande générosité.
Kate : Viens, Edwina. Nous sommes attendues.
Benedict se rend au club ouvert par Mondrich.
Mondrich : M. Bridgerton ! Bonsoir, votre présence m'honore.
Benedict : Tout l'honneur est pour moi, M. Mondrich. L'endroit est extraordinaire. Cela dit, j'arrive peut-être trop tôt.
Mondrich : Avec le temps, il y aura plus de monde, naturellement. Il y a une rumeur comme quoi vous même vous êtes un artiste.
Benedict : Oh. Je… barbouille.
Mondrich : Dans ce cas, vous devez rencontrer M. Cruikshank. C’est un illustrateur de talent qui a beaucoup de relation parmi les artistes et les marchands d'art.
Benedict : Je suis toujours ravi de rencontrer des personnes talentueuses.
Mondrich : C'est précisément ce qui rend mon établissement différent, Bridgerton ! Je sais que vous et vos frères vous sentez chez vous dans des établissements comme le White, mais chaque honnête homme, quel que soit son titre, son rang, ou son occupation, est bienvenu chez moi.
Benedict : Je veux vous dire monsieur Mondrich, je suis vraiment heureux de voir le raffinement du club que vous avez bâti à la sueur de votre honnête labeur. Bravo.
Chez les Bridgerton.
Colin : L'éducation canine ?
Violet : Oui. Vous avez peut-être un ami qui trouve ce domaine digne d'intérêt.
Colin : Mère, vous vous sentez bien ?
Eloïse : Non. Je crains que non.
Anthony : On ne m’a pas dit qu'il y avait un bal ce soir.
Violet : Une soirée, plutôt. Vous n'avez pas reçu votre invitation par le valet de lady Danbury ?
Anthony : La soirée a lieu dans sa demeure. Et miss Sharma aime à m'accuser de duperie.
Violet : Qui l'en blâmerait ?
Anthony : Pardon ?
Violet : Elle veille sur miss Edwina. Elle espère lui trouver l'âme sœur. Et avec vous qui affirmez si franchement votre dédain pour l'amour… Les prétendants de miss Edwina auront à cœur de choisir leurs mots avec précaution ce soir. Certains vont lire de la poésie, je crois. Il y a une leçon à en tirer quelque part, Anthony. J'espère que cette fois, elle vous servira. Venez.
La soirée chez Lady Danbury. Chaque prétendant démontre son talent.
Kate : Au moins, ce sont les hommes qui se rendent parfaitement ridicules, pour une fois.
Eloïse : C’était votre idée ?
Kate : J'aimerais en avoir le mérite, mais non. Lady Danbury a suggéré que les poètes lisent leur vers. Ces messieurs grâce à leur esprit de compétition ont concocté le reste de cette bouffonnerie tout seuls.
Eloïse : Rien d'étonnant.
Mary : Bravo. (On entend un rire forcé)
Kate : Vous êtes la sœur du vicomte je crois ?
Eloïse : L'une d'elles. Mais croyez bien que je n'y suis pour rien.
Kate : Le fait que le vicomte soit votre parent me ferait presque l'apprécier davantage.
Eloïse : Il ne faudrait pas lui accorder trop de crédit non plus n’est-ce pas ? C'est quoi, ça ?
Lady Danbury : Merci. Merci. Et si nous faisions une pause ?
Edwina : Quelle belle robe.
Pénélope : Merci.
Edwina : La vôtre me plaît beaucoup.
Pénélope : Vous avez le sens de l'humour.
Edwina : Non, je n'oserais jamais … Elle me plaît beaucoup. Elle est vraiment belle.
Pénélope : J'ai fini par me lasser de la couleur.
Edwina : Oui, je le conçois. Quoi que je pense, en vérité, que la couleur importe peu. Mais c'est comment on la porte. Vous la portez bien, miss…
Pénélope : Pénélope Featherington. Excusez-moi.
Elle rejoint Colin
Pénélope : Alors, qu'allez-vous faire ce soir ? Une chanson ? Une gigue ? Ou comptez-vous peut être révéler au monde un talent caché au cerceau ?
Colin : J'ai bien peur de n'être qu'un simple spectateur.
Pénélope : Que d'intérêt témoigné à une jeune fille que personne ne connaît.
Colin : Pas de passion pour le mystère, Pen ?
Pénélope : Moi ? Non. Je m'empresse de lire le dernier chapitre en premier. À propos de mystères, vous devez me révéler le nom de cette jeune dame rencontrée pendant votre voyage.
Colin : Je ne comprends pas.
Pénélope : Vous avez mentionné aux courses que vous n'étiez jamais seul. J'avais donc supposé… Peu importe. Regardez. Il y a vraiment un champion de cerceau ce soir.
Colin : Vous avez raison. Je n'étais pas vraiment seul lors de mes voyages. Je me suis mis à converser vraiment avec quelqu'un que je connais depuis fort longtemps. Et pourtant, après ce qu'il s'était passé avec miss Thompson, je me suis rendu compte que je ne connaissais pas vraiment cette personne. Moi-même.
Pénélope : Vous-même ?
Colin : C'est grâce à vous. Vos lettres étaient si encourageantes. Oui, je me disais : Si Pénélope me voit de cette façon, alors, j'y arriverai aussi. J'étais seulement… trop distrait par miss Thompson. Alors, j'ai fait le vide dans ma tête, renoncé aux femmes et à l'amour. Et au fond, ce que je voulais, c’était comprendre qui je suis avant de reprendre ma place dans le monde.
Pénélope : Vous avez renoncé aux femmes alors ?
Colin : Oui, pour le moment.
Pénélope : Moi, je suis une femme.
Colin : Vous êtes Pen. Je ne vous compte pas. Vous êtes mon amie.
Pénélope : Bien sûr. Votre amie. Ravie de l'entendre.
Il s’en va et la laisse seule.
Lady Cowper : Merci.
Cressida : Oui, je le trouve très élégant aussi.
Lady Cowper : Le nouveau lord Featherington est sans doute un homme de goût.
Portia : Lady Cowper. Miss Cowper. Quel collier exquis vous avez là. Une largesse du nouveau lord Featherington ?
Lady Cowper : Il n'a rien dit de ce cadeau ? Il nous a rendu visite aujourd'hui.
Portia : Je n'ai pas dû y faire attention. J'étais trop occupée avec le mariage de Philippa et tout le reste.
Lady Cowper : C'est un geste très généreux, je trouve non ? Je me demande ce qu'il signifie.
Portia : Il ne signifie pas grand-chose. Le nouveau lord est très prodigue de cadeaux, j'avoue que j’ai bien du mal à suivre.
Lady Cowper : Oui. Venez, ma chérie.
Jack : Bonsoir, miss Cowper.
Au Club de Mondrich.
Benedict : J'ai vu Gerard qui peignait. C'était merveilleux.
George Cruikshank : Une authentique vision.
Benedict : Et vous affirmez que Gerard, Leighton et Turner ont tous étudié à la même académie ?
Cruikshank : Absolument et il y a une place vacante, d’après ce que je sais. Si vous songez sérieusement à la peinture, c'est là-bas qu'il faut être.
Anthony (qui fait irruption) : Benedict. J'ai besoin de toi.
Benedict : Je suis en pleine conversation.
Anthony : Je t’attends dehors. Rejoins-moi.
Benedict : Excusez-moi.
Anthony : J'ai besoin que tu m'apprennes à bien lire ces vers à haute voix.
Benedict : Du Byron ? Je t'ai frappé plus fort que je ne croyais.
Anthony : "Il est un plaisir sûr - Dans ces bois sans chemin… "
Benedict : Oh.
Anthony : "Il est un enchantement dans cette … " Comment le dire pour qu'il sonne bien ?
Benedict : J’ai bien peur que ce ne soit pas possible. Ce poème est l'un de ses plus mauvais. Un défi au bon sens.
Anthony : Pourtant, je croyais que ce genre de choses te procurait beaucoup de plaisir.
Benedict : La poésie, oui. Byron, grand Dieu, non.
Anthony : Tout le monde n'est pas sensé aimer Byron ?
Benedict : Beaucoup de mes camarades à Cambridge trouvaient ma poésie bien supérieure à la sienne.
Anthony : Cela signifie que la tienne est plus mensongère ou moins ?
Benedict : Mensongère ? La poésie est l'opposé, mon frère. Elle est l'art de révéler une vérité précieuse avec des mots.
Anthony : Ah. Ça tombe sous le sens. Tu es sérieux ?
Benedict : Mm-hmm.
Anthony : Grand Dieu. Bonsoir.
Benedict : "Qu'est-ce donc en vérité qu'admirer une femme ? La regarder et se sentir inspiré ? Se ravir de sa beauté. Au point que le mur de vos défenses s'effondre, que vous endosseriez volontiers toutes les peines, tous les fardeaux pour elle, pour honorer cet être de lumière par vos actes et vos mots". Voilà ce que le vrai poète décrit mon frère.
Anthony : Tu devrais faire des vers plus souvent. Note-les-moi tout de suite.
Chez Lady Danbury.
Lord Lumley : "Et courant sur cette joue et ce front si doux, si calme, éloquent pourtant Le sourire triomphant. Les teintes scintillantes qui parlent de jours de douceur et de bonté. Un esprit en paix, une âme lumineuse. Un cœur dont l'amour est tout innocence."
Lady Danbury : Je tiens à remercier tous ces messieurs pour la splendide démonstration de leurs talents ce soir. Un moment exceptionnel que vous n'oublierez pas de sitôt.
Anthony : Pardonnez-moi. Lady Danbury.
Lady Danbury : Lord Bridgerton, je ne vous attendais plus ce soir.
Anthony : Il y avait une omission sur la liste d'invités. Vous n’auriez pas privé un jeune homme que vous connaissez depuis 29 ans du plaisir de votre compagnie ?
Lady Danbury : Ho, mais…
Anthony : Et votre valet de pied à la porte d’entrée non plus.
Kate : Navrée, vicomte. Une fois de plus vous êtes en retard. Nous allions mettre un terme à cette soirée.
Anthony : J'ose croire que miss Edwina à le temps de m'écouter. J'ai passé la soirée à écrire des vers de ma plume. Est-ce que vous souhaitez les entendre ? Tout le monde souhaite les entendre ?
L’assemblée : Oui - Oui, vicomte. - Allez-y, lord Bridgerton.
Anthony : Hmm. "Qu'est-ce donc… d'admirer une femme ? La regarder et se sentir inspiré. Se ravir de sa beauté au point que le mur de vos défenses s'effondre, que vous endosseriez volontiers toutes les peines tous les fardeaux pour elle pour honorer… pour…" Pardonnez-moi, je ne peux pas continuer. Je ne peux prétendre que ces mots sont les miens, ils sont de la main d'un autre. La vérité, c'est que je ne suis pas… doué pour la poésie. Et ces mots flatteurs sont certes très beaux et doux à l'oreille, mais ils sonnent creux aussi s’ils ne sont pas accompagnés d'action. Miss Edwina, je pourrais me présenter devant vous en prétendant être quelqu’un d’autre et souhaiter les mêmes choses que vous. Ce serait mentir. Je suis peut-être incapable de… d'offrir les démonstrations de passion que vous êtes en droit d'attendre. Mais je peux vous assurer que lorsqu’il s'agit d'action et de devoir, jamais je ne serai pris en défaut. Et j'espère que cela parlera plus en ma faveur que tous les mots aimables le pourraient.
Kate : Tu as entendu cela, ma sœur ? Il ne te donnera pas l'amour que tu mérites.
Edwina : Cela fait-il de lui un mauvais homme ou un honnête homme, Kate ? C'est la marque d'un vrai gentleman, comme Appa nous le disait. Non ?
Elle rejoint Anthony qui lui offre un verre de limonade.
Edwina : Merci… C'est délicieux.
Kate ne peut supporter cette victoire d’Anthony et part dans sa chambre où Lady Danbury la rejoint.
Lady Danbury : Vous devriez retourner à la réception.
Kate : Je vais y retourner dans un moment.
Lady Danbury : Il va sans dire que le vicomte vous irrite au plus haut point. Il est parfois exaspérant.
Kate : Il est incorrigible. Il n'est pas pour ma sœur. Et je ferai en sorte qu'elle s'en rende compte d’une manière ou d’une autre.
Lady Danbury : Un petit conseil, miss Sharma ? Lorsque nous nous sentons frustrées, il est souvent plus sage de s'employer à satisfaire nos propres besoins. Nos tentatives d'influencer les autres quant à la bonne marche à suivre s'avèrent trop souvent des efforts tant agaçants qu'éprouvants et qui font ressortir le pire en nous avant que l'on découvre qu'ils ont été infructueux tout du long.
Kate : Oui, j'ai bien conscience de m'être rendue ridicule ce soir Lady Danbury. Je ne tiens pas à l'entendre de votre bouche. En fait, je ne tiens à l'entendre de personne. Cela m'est bien égal ce que tout le monde ici pense de moi. Une fois qu’Edwina sera mariée, je rentrerai chez moi seule, trop heureuse de ne plus remettre les pieds dans cette ville que j'exècre.
Lady Danbury : Vous avez encore beaucoup à apprendre et tout cela est bien beau. Mais d'abord, je trouve non seulement affreusement affligeant, mais aussi une injure à la vérité, de vous entendre dire que vous désirez vous retrouver seule à seulement 26 ans.
Kate : Ne soyez pas si étonnée. Je vais devenir gouvernante. Je serai satisfaite de savoir ma sœur entre de bonnes mains.
Lady Danbury : Satisfaite ?
Kate : Êtes-vous si malheureuse, madame ?
Lady Danbury : Je vous demande pardon ?
Kate : Vous-même, n'êtes-vous pas seule ? Je vous observe et je le vois, vous êtes plus que satisfaite.
Lady Danbury : Parce que j'ai la chance d'avoir profité de la vie. Je suis veuve. J'ai aimé avec passion. J'ai perdu l'être cher. J'ai gagné le droit de faire ce qui me plaît, quand cela me plaît, et de la manière qu'il me plaît de le faire. Mon enfant, vous n'êtes pas moi. Et soyez sûre que si vous continuez dans cette voie, je peux vous l'assurer, vous ne le deviendrez jamais.
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Il y a deux choses qui se cachent dans les rues sombres et ombragées de notre belle ville. La vermine et les secrets. Je vous laisse seuls juges, chers lecteurs, de ce qui fait le plus de mal. On doit se demander quels secrets chers à son cœur miss Edwina, le diamant de la saison, garde-t-elle par-devers elle. Et avec qui choisira-t-elle de les partager. Le vicomte Bridgerton, peut-être ? En tout cas, l'opinion de l'aînée des Sharma sur le sujet n'est certes plus un secret pour personne.
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Chez les Bridgerton.
Pénélope : Si vous êtes aussi contrariée par la manière dont lady Whistledown écrit, vous devriez peut-être cesser de la lire.
Eloïse : Elle a fini par se trahir.
Pénélope : Enfin, quoi ? Éloïse.
Eloïse : Je ne voulais pas vous le dire, parce que… D'abord, j'étais embarrassée et j'ai cru que j'avais tort. Je suis passée voir son imprimeur hier.
Pénélope : Eh bien ? Avez-vous parlé avec quelqu'un ?
Eloïse : Ça n'a pas d'importance. Écoutez. Non seulement les papiers d'impression sont identiques mais les lettres K sont légèrement déformées exactement de la même façon. Nul doute qu’il ne s'agit pas d'une autre coïncidence.
Pénélope : Et bien, il faudra être attentives. Si dans le prochain Whistledown, il y a le même défaut, nous saurons que cet imprimeur est le sien.
Le lendemain, au marché.
Pénélope : Une lettre K neuve pour une presse Stanhope.
Marchand : Voilà. Ça vous fera dix pence.
Pénélope : Je vous en donne cinq.
Marchand : Cinq, c'est un prix spécial pour mes clients, les habitués.
Pénélope : Crois-moi, l'ami, tu serais bien embêté que je revienne souvent. Allez, fais-moi un rabais et je promets de ne pas revenir me plaindre.
Geneviève Delacroix : Miss Pénélope ?
Pénélope s’enfuit en courant.
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Pour être juste, il faudrait reconnaître que votre chroniqueuse n'est pas avare s'agissant de partager ses secrets. Car qui d'autre pourrait se vanter de vous tenir tous si bien informés ?
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Brimsley : Je les ai, Votre Majesté.
Charlotte : Et vous êtes certain que ce sont les jeunes filles avec lesquelles notre diamant a conversé dernièrement ?
Brimsley : Oui, Votre Majesté. Et si notre théorie est correcte, cette lady Whistledown se trouve parmi ces portraits.
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Comme quoi même les secrets les mieux gardés finissent toujours par être révélés au grand jour.
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Charlotte étale les portraits sur la table. Sur le dessus, Miss Goring, Eloïse Bridgerton et Pénélope Featherington.